Allons ! descendons, et là confondons leur langage, afin qu’ils n’entendent plus la langue, les uns des autres
Genèse 11 :1-9
Pendant la monarchie de juillet, Mulhouse, ville pluriconfessionnelle, voit la construction et reconstruction des deux Saint-Etienne, la catholique comme la protestante. Elle constitue une illustration exemplaire des apports de forces sociaux comme institutionnels, parfois ambigus, portés par les différents acteurs d’une ville (instances municipales, conseils de fabrique, consistoire réformé, évêché…) dans un contexte de développement économique, industriel et démographique. Les enjeux d’accueil des fidèles comme les questions urbanistiques dans une ville en expansion semblent renvoyés en arrière-plan*.
Un édifice roman avait été consacré en 1186, sur le site d’une église antérieure. Il connaîtra des évolutions avec des ajouts gothiques, du 14ème au 16ème siècle. La tour est dotée d’un bulbe baroque en 1707. Il est implanté sur le site de la future place de la Réunion, espace urbain central de la ville qui accueille également l’Hôtel de la ville.
En 1523, la ville de Mulhouse, ville libre d’Empire, alliée aux cantons suisses, choisit le protestantisme. Les catholiques voient leur pratique religieuse interdite et sont chassés de l’église Saint-Étienne alors consacrée au culte réformé.
L’édifice est détruit en 1858 et l’architecte de la ville Jean-Baptiste Schacre qui vient de réaliser une synagogue à Mulhouse et termine l’église catholique Saint-Etienne**, est chargé de la réalisation du nouveau temple Saint-Étienne. Il sera de style néo-gothique, comme le sanctuaire catholique.
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La première pierre est posée en 1859 et l’inauguration de l’édifice se fera en 1866. La flèche du temple culmine à 97 mètres. Il s’agit du plus haut clocher du Haut-Rhin comme du plus haut clocher protestant de France. Le style du bâtiment, comme la taille de son clocher, lui valent d’être parfois considéré comme la cathédrale de Mulhouse***.
Son intérieur respecte les principes des temples réformés, déformant les règles gothiques originelles, avec en particulier une absence de colonnes et un rapport largeur-longueur différencié. Cependant, la présence de très beaux vitraux provenant de l’ancienne église, assombrit la nef. Une chaire néogothique s’appuie sur le mur du fond. La force de la Parole atteint les fidèles.
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Poursuivant leurs jeux de regards en coin, les deux églises Saint-Etienne se sont dotées des plus somptueux orgues romantiques de leurs temps, réalisés par les maîtres incontestés de ces styles : la protestante avec un romantique allemand d’Eberhadrt-Friedrich Walcker*****, la catholique avec le seul vrai Cavaillé-Coll d’Alsace. Ce dernier a été commandé la même année que le Cavaillé-Coll de l’église Saint-Charles de Marseille, située rue Grignan, longtemps appelée rue de la Tolérance parce qu’elle accueille également une synagogue et un temple réformé.
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*Les élites politiques et économiques protestantes sont réticentes à voir s’y implanter une seconde église catholique dans la ville malgré l’indiscutable argument démographique. C’est bien le développement économique porté par elles qui attire les ménages catholiques, avec aussi, en arrière-plan, l’horizon bientôt perceptible de 1848. Voir La construction des deux Saint-Etienne, un catalyseur des crispations interconfessionnelles à Mulhouse (1830-1866) – David Tournier
**Sur l’ancien champ de manœuvre
***Comme l’est souvent pour les visiteurs de Marseille l’église des Réformés, elle-aussi néogothique
*****Malheureusement transformé au 20ème siècle
L’église des réformés depuis ma fenêtre
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A suivre…
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