Ici les hommes ardents peuvent autant qu’ils veulent rentrer en eux-mêmes et y demeurer ; faire pousser vigoureusement les vertus et se nourrir avec délice de fruits du paradis.
Saint Bruno le Chartreux

Les Chartreux – Lyon
Un monastère à Marseille
En 1633, le maréchal de Vitry, gouverneur de Provence, pose la première pierre du monastère des Chartreux de Marseille. De grandes familles ont contribué par leurs dons à sa réalisation. L’évêque de Marseille, Monseigneur de Puget; bénira le petit cloître en 1652. La Chartreuse-mère, l’abbaye de Villeneuve-lès-Avignon, à l’initiative de la création, soutient l’acquisition des livres précieux, de vases et de vêtements sacrés.
Le monastère se situe au calme, hors de la ville, mais assez proche d’elle, avec des terres irrigables depuis le Jarret. L’église se trouvait au cœur de la propriété. Une allée, actuellement boulevard d’Arras, conduisait aux bâtiments conventuels et aux moulins à vin ou à eau. Les jardins maraichers entouraient les constructions. L’axe du grand cloître forme l’actuel boulevard de la fédération.
En 1666, Jean-Baptiste Berger devient prieur. Architecte talentueux, il concevra le projet d’ensemble et en portera la réalisation. La construction de l’église débute en 1680. Elle ne sera consacrée qu’en 1702, faute de financements, et le grand cloître demeurera inachevé.
Dom Berger devint procureur général de l’ordre des Chartreux. Après avoir obtenu d’être relevé de ses charges, il devint prieur à Villeneuve-Lès-Avignon avant de revenir à Marseille.

À peine l’église achevée, Dom Berger se retire définitivement et meurt comme simple religieux à Marseille en 1719. Louis XIV mit le couvent sous sa sauvegarde en 1656.
Une église paroissiale


Magnificence et recueillement sont réconciliés par ce magnifique ouvrage du grand siècle, d’un accès presque secret pour le visiteur de Marseille
La révolution supprime les ordres religieux. Elle confisque les biens des Chartreux de Marseille. Seule l’église échappera à la vente, devenant paroissiale sous le vocable de Sainte-Marie-Madeleine-des-Chartreux. La liquidation des 2480 livres de la bibliothèque prend neuf jours pour un prix dérisoire. Les jardins sont achetés par des maraîchers*.
Dom Joseph de Martinet, l’un des moines et seul prêtre non jureur de Marseille, reste sur place, caché dans les ruines. Il mènera par la suite une vie errante.
Les premières années, la vie de la nouvelle paroisse, peu peuplée, reste atone. Mais avec l’augmentation de la population du quartier après 1850, l’église se révèle trop petite. Des travaux entrepris par la ville rassemblent alors les bas côtés et la nef centrale, perçant les arcades aveugles qui les séparaient.
D’abord une façade
La façade large de 31 mètres donne sur une place qui élargit la rue d’Arras, axée sur le monastère et qui donne à voir l’église de loin. Un péristyle soutenu par huit colonnes ioniques projette le sanctuaire vers l’avant. Sur son dessus, huit socles devaient accueillir des statues jamais réalisées. L’ordre supérieur, en retrait de cinq mètres, comprend quatre pilastres corinthiens avec au centre une grande verrière et un fronton surmonté d’une croix.
L’entablement porte l’inscription Cartusia Villae Novae Hanc Massiliensem fundavit Anno MDCXXXIII **.
Deux médaillons de 1956, sculptés par Alfred Lang, représentant Saint Bruno et Sainte Marie-Madeleine, décorent la porte en noyer de 1700. Les épais ventaux ont été réalisés par les maîtres menuisiers Olivier Guignat et Jean-Baptiste Onillon.


A l’intérieur, des va et vient
En 1833, le tableau représentant L’apothéose de Sainte-Marie***, de Michel Serre, retrouve l’église. C’est le seul tableau qui subsiste des 35 toiles que possédait le monastère. La chapelle des fonts baptismaux accueille une statue en marbre de Notre Dame du rosaire enfouie dans les anciens jardins du monastère pour la soustraire à la destruction révolutionnaire.


Le maître-autel, réalisé en 1893 par les ateliers Sauvigne sur les plans de Théophile Dupoux, architecte du Sacré-Coeur et de Saint-Philippe, représente un tombeau décoré des armes des Chartreux, le globe et la croix dans une guirlande de lauriers. Dans une niche à droite se trouve une statue de Marie Madeleine et dans une autre, à gauche, Marthe terrassant le dragon.
La chaire monumentale en bois de chêne, de style flamand, réalisée en 1862, provient des ateliers Goyer de Louvain. Georges Chauvel, artiste de passage, a taillé un Christ monumental dans un tronc de la Sainte Baume. Sous la coupole, pour une seconde fois, l’emblème des Chartreux. Louis Botinelly et Alfred Lang ont réalisé plusieurs œuvres qui embellissent l’église.








Rappelons-nous donc quel amour plus qu’excellent le Christ nous a montré dans l’ouverture de son côté en nous ouvrant par là large accès à son Cœur.

Des vitraux du 20ème siècle ont remplacé ceux de 1870, brisés en 1952 par une explosion dans une usine voisine qui fit 17 morts.
Le 15 août 1906, un incendie dans l’édifice détruit l’orgue Daublaine & Callinet de 1843. Un nouvel instrument de Charles Mutin le remplace en 1912. Il comprend trente-deux jeux.
Notes
*En 1803, un jardin des plantes, dirigé par Bernard Gouffé de Lacour, est installé sur une parcelle de l’ancien jardin de la chartreuse. Il subsistera jusqu’à la construction de la ligne de chemin de fer Marseille-Toulon.
** La chartreuse de Villeneuve a fondé cette maison à Marseille en 1633
*** Le musée des Beaux-Arts en présente quatre

Le quartier des chartreux, dans un creux à l’arrière des 5 avenues, est invisible depuis mes fenêtres. Pour apercevoir le clocher de Sainte-Marie-Madeleine-des-Chartreux, il faut rejoindre la montée de l’avenue Montolivet.
A suivre…
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