La synagogue Breteuil – Beth Yossef de Marseille

Je m’étais retiré sur la montagne pour recevoir les tables de pierre, les tables de l’alliance contractée par le Seigneur avec vous.

Devarim 9, 9

Une histoire juive de Marseille

Au moyen-age, la présence juive à Marseille est significative, avec deux juiveries, plusieurs synagogues et une yeshiva. La juiverie de la ville basse, ouverte, plutôt habitée par des familles aisées, se situe près de l’église Saint-Martin. De riches chrétiens y résident, attestant d’une tolérance mutuelle. Celle de la ville haute semble réservée à des juifs moins favorisés. Aucun vestige de cette époque n’a été mis au jour.

Les comtes de Provence ont toujours protégé les juifs dans leur possessions, malgré des troubles, des violences et des pressions régulières. Avec le rattachement de la Provence à la France au tournant du 16ème siècle, la situation change. Les rois de France appliquent dans leurs nouveaux territoires les politiques d’expulsion du royaume, déjà anciennes*.

Par la suite, Marseille, ville ouverte, accueille de nouveau, peu à peu, des commerçants juifs qui s’enhardissent, répondant aux besoins du commerce international. Puis ils sont poursuivis à nouveau par crainte de la concurrence qu’ils représentent pour certains marchands de la ville. Ce cycle d’arrivée et de départ se reproduit et cependant, peu à peu,la communauté s’organise et s’unifie. Dépassant ses divergences, elle fait construire une synagogue et un nouveau cimetière en 1804.

La synagogue de la rue Breteuil

La communauté est majoritairement installée au sud du centre-ville, dans des quartiers aisés. En proportion moindre, des familles juives habitent les quartiers populaires au nord du Vieux-Port, dans la vieille ville et à Belsunce.

En 1863, la communauté fait construire la synagogue Breteuil – Beth Yossef** suivant un plan basilical, établi par Nathan Salomon. Elle se présente comme comme le plus ancien monument juif de la ville et partage avec la Major ou Notre Dame de la Garde. le style romano-byzantin alors en vogue. La construction de la basique perchée, dessinée par Henri-Jacques Espérandieu, architecte protestant, s’achève comme la synagogue en 1864.

La rue de Breteuil, comme la rue Paradis, accompagne avec la croissance de ses numéros le développement de la ville aux 19ème et 20ème siècles. L’inscription de la synagogue Breteuil dans l’histoire urbaine et architecturale de Marseille fait comme un écho à une phrase d’Augustin Fabre : … l’une des villes les plus accueillantes pour les Israélites, grâce au contact de tant d’hommes d’origines, de mœurs et de croyances diverses, sans cesse rapprochés par les relations du commerce. 

La lumière et la parole

Avec son plan basilical, la synagogue se fait à l’image de nombreuses églises. Le dessin du marbre au sol guide le fidèle depuis l’entrée jusqu’à l’arche sainte qui accueille les livres de la Torah. Le bâtiment présente des qualités acoustiques exceptionnelles liées à sa hauteur. Elle se met au service des offices et les lectures publiques, portés depuis l’estrade centrale en bois, offerte en 1889 pour le 100ème anniversaire de la révolution française***.

Une chaire en bois installée dans la nef mais jamais utilisée, donne à voir l’influence chrétienne sur l’architecture de l’édifice.

Les vitraux renvoient des couleurs vives. Ils psalmodient sous un chatoiement joyeux.

Les références stylistiques et les matériaux mêlés, venant d’Orient et d’Occident, font écho aux origines géographiques multiples des fidèles, comme l’ont fait les sanctuaires chrétiens contemporains.

L’organisation de la parcelle permet de séparer le culte de l’enseignement et de l’administration. Deux pavillons dédiés à ces fonctions encadrent la façade monumentale. Cette dernière se place en recul par rapport à la rue. Elle est ornée d’une rosace centrale qui s’inspire des façades romanes. Les tables de la loi en font la couronne.

A l’arrière, impasse du Dragon, la Breteuil – Beth Yossef poursuit son exposé.

Et Dieu dit que la lumière soit et la lumière fut.

Béréchit 1, 3

Notes

*Childebert Ier publie en 533 le premier édit d’expulsion

**Elle remplacera Le temple de la rue de Grignan, construit sous le Second Empire, à l’époque dans un état de délabrement avancé et trop petit pour accueillir la communauté. Ce temple avait pris la suite d’une synagogue située rue du Pont, lui-même précédé d’un culte attesté rue de Rome dès 1770

***Cadeau de Naquet, Président du Consistoire central israélite de France


De mes fenêtres je vois la nef de la synagogue Breteuil.

Elle surplombe la partie basse de la ville et s’inscrit au centre du carré des sanctuaires,

comme Saint-Nicolas de Myre ou Saint-Joseph.

A suivre…


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