Domus Dei et porta coeli.
Inscription sur la façade de l’église Saint-Eutrope de Méounes-les-Montrieux

Marseille passe par Méounes et Notre-Dame Saint-Eutrope
Méounes lès-Montrieux, une commune du Var, à 50 kilomètre de Marseille, est établie au creux d‘une vallée étroite que suit le Gapeau, fleuve côtier. Cette vallée, très ancien couloir de passage, conduit de Brignoles à Toulon.
Après une première implantation à l’ouest de la vallée, puis une seconde sur les hauteurs à l’est, protégé par un castrum, le village se développe au fond de la vallée. L’eau et la route lui offriront une petite prospérité, troublée en période de guerre et de violence*. Trois églises ont accompagné cette histoire urbaine : Saint-Lazare vers l’ouest, à l’emplacement d’un sanctuaire Jupitérien, puis Saint-Michel en surplomb, à l’est, en enfin, Notre-Dame-Saint-Eutrope, l’actuelle église paroissiale, au centre du village actuel.


Du 13ème siècle à la révolution, Méounes appartenait à l’évéché de Marseille qui l’avait acquise auprès de Guillaume de Signes. Les relations entre le village et les évêques font une alternance d’appuis réciproques et de désaccords matériels ou économiques. Qui paiera pour la restauration de l’église ou l’entretien du clergé ? Les syndics et consuls, attestés depuis 1174, forment une sorte de conseil municipal capable de s’imposer face à la puissance ecclésiastique.
Au 17ème siècle, le village conserve une vocation principalement agricole, mais voit se développer un tissu industriel le long de la rivière le Gapeau avec des moulins à blé, à huile ou à sumac, des tuileries, distilleries et papeteries.


Le clocher de Notre-Dame-Saint-Eutrope et, sur la colline, la chapelle Saint-Michel
Un lien fécond
Méounes, au travers du triangle urbain et spirituel de ses trois sanctuaires, trace un schéma fécond qui simplifie et éclaire l’histoire urbaine de Marseille. La petite ville tranquille veut dire le grand port.
Saint-Eutrope, évêque d’Orange au 5ème siècle, est né à Marseille. La ville portuaire abrite une église Saint-Michel-Archange. La seconde église de Méounes placée sous le vocable de Saint-Lazare, renvoie à l’église primitive de Marseille et à son évangélisation par l’ami de Jésus.
Le jeu peut se poursuivre avec les croix de bois et les croix de fer.

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L’église Notre-Dame-Saint-Eutrope


La construction de l’église Saint-Eutrope débute en 1540. Progressivement agrandi, le sanctuaire accompagnera la croissance démographique de la commune au long des siècles. En 1743, Monseigneur de Belsunce, évêque de Marseille, le placera sous la double invocation de la Vierge Marie et de saint Eutrope
La commune et le chapitre de Marseille partagent à égalité les frais de construction. Les travaux s’achèvent rapidement. L’évêché ne met pas le même empressement à y établir le culte. Retard qui sera source de conflits.
L’intérieur de l’église est richement ornementé : retables dorés, statues de saints par Antoine Duparc, auteur de plusieurs autels monumentaux*** à Marseille, bustes-reliquaires de saint Eutrope et saint Eloi…
Le bras qui contenait les reliques de Saint-Eutrope offertes par Monseigneur de Belsunce, a disparu.

Des liens encore et des conflits
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La chartreuse de Montrieux**** fondée au 12ème siècle sur le territoire de la commune, est toujours occupée par des Chartreux. Plusieurs œuvres présentes dans l’église Notre-Dame- Saint-Eutrope en proviennent. Des désaccords ont longtemps subsisté entre la commune et le monastère autour de l’exploitation de terres. Jusqu’en 1979, la chartreuse accueillait la Vierge au bouquet provenant de Notre-Dame de la Garde.
Les chartreux ont occupé le site dés 1137. Peu après la fondation, un chartreux aurait rapporté d’Orient des graines et des plants d’aliboufier ou styrax qu’il plante autour du monastère. L’aliboufier couvrira les colline alentour et se déploie toujours sur des dizaines de kilomètres.
L’histoire de cette importation reste cependant discutée.
Les moines ont utilisé la résine d’aliboufier comme parfum pour de l’encens ou pour la fabrication de chapelets*****. Cette résine, recueillie par gemmage, permet aussi la réalisation du baume storax utilisé contre les affections respiratoires ou pour soigner des plaies.
J’ai exhalé mes senteurs, comme le galbanum, l’ambre et le styrax, comme un nuage d’encens dans la tente de la Rencontre.
Ben Sira le Sage :24, 15

Notes
*Saint-Éloi est très populaire en Provence où il est fêté deux fois : en hiver comme patron des orfèvres et en été pour les charretiers et les paysans.
**Campagnes de Charles-Quint, guerres de religion, troupes Austro-Sardes dévasteront le village
***Saint-Cannat, les Grands Carmes
***Cette chartreuse est la 8ème maison de l’ordre
****La résine de styrax, une fois séchée, devient très dure

Depuis l’ancienne église Saint-Michel, on aperçoit une chapelle rebâtie sur le site de Saint-Lazare, aujourd’hui privatisée, et Notre-Dame Saint-Eutrope.
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A suivre…
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