Pour éclairer, la chandelle doit se consumer.
Saint-Charles Borromé.

La ville s’agrandit
L’église Saint-Charles fait l’angle des rues Breteuil et Grignan. De style classique, elle propose un retour nostalgique à l’ancien régime. Le sanctuaire apparait alors comme une réponse à la construction de bâtiments symboles de la République, établis sur le site d’églises démolies par la révolution. La Préfecture fait face à l’ancienne église Saint-Ferréol, place Félix Baret. Et le Palais de justice a pris la place du couvent des Picpus. Comme pour Saint-Joseph, c’est Fortuné de Mazenod qui a décidé de sa construction. Il fallait répondre au manque de lieux de culte sur la rive gauche du port en expansion, et après la démolition du 3ème Saint-Ferréol.
Aujourd’hui affectée au rite romain selon sa forme extraordinaire (offices en latin) elle soutient son rôle de renvoi vers des temps regrettés.


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Une nouvelle église
En 1828, Fortuné de Mazenod consacre l’église à saint Charles Borromée. Elle remplace une chapelle installée à proximité, aux débuts de la restauration, dans deux magasins*. Le modeste sanctuaire avait été dédiée à Jérôme, prénom de Champion de Cicé, l’évêque d’Aix alors en charge de Marseille. Son diocèse couvrait les Bouches-du-Rhône et le Var. Homme politique des temps révolutionnaires, il avait rédigé la version de la Déclaration des droits de l’homme approuvée par l’Assemblé constituante. En ecclésiastique, il savait que la vertu se situe entre défenseurs du statu quo et partisans de la table rase. Saint-Charles semble ainsi discrètement mais durablement placée dans un entre-deux.
La partie supérieure de la façade imite celle de l’église des Chartreux, édifiée en 1680. Sur la rue de Breteuil, la nef ne présente qu’une fenêtre, assurant dans la nef une pénombre propice à la prière. Un petit clocher donne sur la cour. L’église est dite Saint-Charles intra-muros, l’église de la Belle de Mai étant , quant à elle, nommée Saint-Charles extra-muros.
Un intérieur hors de son temps
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Peut-être parce qu’elle est une église d’entrepreneurs (Mouren et Guieu), Saint-Charles porte l’empreinte de ce classicisme révolu. Mouren, également architecte de l’édifice, a adopté un plan très équilibré en forme de croix grecque, avec en extension un chœur peu profond. Un petit oculus éclaire une coupole sans tambour.
Autels, statues et tableaux, bien distribués, renforcent ce sentiment rassurant d’être en des lieux connus. De Jean-Joseph Dassy, Augustin Aubert, Louis Castex, elles semblent plus sagement rangées que leurs consœurs de la Trinité.**

A droite en remontant l’église, le baptistère, l’autel de saint Joseph et l’autel de saint Charles-Borromée.A gauche l’autel du Sacré-Cœur et celui de Notre-Dame des Malades.
Une corniche court autour de la nef, au-dessus des colonnes aux chapiteaux composites. Aux quatre coins de l’église, on retrouve quatre coupoles aplaties. Des voûtes en plein cintre couvrent les bras de la croix formés par le sanctuaire.
Jules Cantini.a réalisé le décor intérieur. L’autel baroque monumental est inspiré de celui de la chapelle des Bernardines, de Fossati, qui a rejoint l’église Saint-Cannat.
JESUS SALVATOR MUNDI
Inscription sur la frise de l’autel

La Grignan a longtemps été appelée rue de la Tolérance parce qu’elle accueille l’église Saint-Charles, un lieu de réunion des juifs de Marseille, propriété du premier Grand Rabbin de Marseille et un Temple réformé. Cet œcuménisme tranquille renvoie au travers du magnifique orgue Cavaillé-Coll installé à Saint-Charles, vers un vocable répété à Mulhouse, ville pluriconfessionnelle, celui de Saint-Etienne***.

Notes
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*Déjà bâti, le quartier gardait peu de terrains disponibles pour des constructions
**Certaines en carton-pierre comme à la Trinite-la-Palud
***Mulhouse comprend deux églises Saint-Etienne construites toutes deux vers le milieu du 119ème siècle, dotées toutes deux des plus somptueux orgues romantiques de leurs temps, réalisés par les maîtres incontestés de ces styles : la protestante avec un orgue allemand d’Eberhadrt-Friedrich Walcker, la catholique avec un Cavaillé-Coll. Ce qui a permis au temple et à l’église de poursuivre des jeux de regards en coin

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De ma fenêtre, on aperçoit le toit de tuile à quatre pentes qui recouvre la coupole de la nef de Saint-Charles intra-muros, ne laissant émerger que le lanterneau qui surplombe l’oculus
A suivre…
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